Rock en Seine 2024

Après avoir renoué avec le festival l’an dernier, nous avions prévu d’être présents 3 jours (sur les 5 que dure désormais le festival) sur cette édition 2024 de Rock en Seine, même si les groupes qui me bottaient le plus étaient surtout programmés sur la journée du jeudi. D’habitude j’aime bien aller sur les petites scènes pendant le festival pour écouter des groupes nouveaux ou émergents, mais cette année étonnamment les groupes rock étaient tous sur les deux scènes principales, et ce que j’ai entendu de ce qui était programmé sur les autres scènes n’était pas bon, ou pas suffisamment rock pour me donner envie d’y jeter une oreille, ce qui était une forme de déception. Heureusement, les concerts sur la Grande Scène et la Scène de la Cascade m’ont permis de découvrir ou redécouvrir des groupes très bien, et j’en ressors donc quand même satisfait et content.

Jeudi 22/08/2024 :

La programmation principale (Grande Scène et Scène de la Cascade) du jeudi était tellement bonne que Stoeffler a fait l’aller-retour depuis sa lointaine Angleterre pour y être présent. On n’a même pas eu à se casser la tête à organiser le planning du jour, il suffisait d’aller d’une scène à l’autre et les concerts qu’on voulait voir s’enchaînaient sans temps mort et sans (trop) se recouper.

The Last Dinner Party :

Le premier groupe de notre journée était le moins « gros rock », mais c’était parfait pour une mise en ambiance progressive. Lorsque j’ai écouté The Last Dinner Party en préparation du festival, la voix de gorge de la chanteuse et certaines consonances de leurs mélodies m’ont fait penser à Marina & the Diamonds ; leur page wikipedia cite Siouxsie and the Banshees et Florence and the Machine, qui me paraissent de bonnes références pour donner une idée de leur musique. Vêtues de belles robes (ce look fait clairement partie de leur identité visuelle), les membres du groupe animent la scène avec talent, la chanteuse Abigail Morris en particulier qui virevolte dans sa robe à froufrous, se jette à terre, à mi-chemin entre une jeune héroïne de Jane Austen et la rock star débridée moderne. Ce show réussi m’a progressivement conquis, et je recommande leur écoute à tous nos lecteurs et lectrices qui apprécient un rock original, mêlant guitares électriques, claviers et chœurs faussement angéliques.

Dead Poet Society :

Voilà un groupe dont j’ignorais tout il y a deux semaines, mais dont le son m’a tout de suite plu quand j’ai écouté leurs titres en préparant le festival : on parle là de gros rock, dans la même veine que des groupes comme Royal Blood et Cleopatrick qu’on aime beaucoup ici (je parle pour les deux personnes qui continuent à écrire sur ce blog, bande de lâches !), avec un son de guitare mi-garage, mi-stoner, lourd et crasseux, des riffs efficaces mais rarement simples, une batterie puissante et un certain goût pour les rythmiques syncopées. Le concert a été pas mal gâché par le mauvais équilibrage du son sur la scène de la Cascade (le problème s’est posé toute la journée, et de nouveau le dimanche) : les basses (guitare et grosse caisse) étaient trop fortes et couvraient le reste, mais clairement, ce groupe est entré dans ma playlist et je suis bien content que le festival m’ait donné l’occasion de les découvrir et de les voir sur scène.

Kasabian :

On vous a déjà souvent parlé de Kasabian sur ce blog, je ne vais donc pas vous refaire l’historique de ce groupe qu’on suit ici depuis le milieu des années 2000. Steven m’a toutefois appris peu avant le concert que le chanteur, Tom Meighan, avait quitté le groupe d’un commun accord à la suite de la révélation du fait qu’il avait agressé physiquement sa compagne… Voilà qui change pas mal la configuration du groupe, dont le frontman assurait une bonne partie de l’énergie et de l’animation sur scène, et cette rupture capitale s’entend clairement sur les albums produits depuis la séparation, au son plus léger. L’autre figure majeure du groupe, le guitariste Sergio Pizzorno, a repris le flambeau du chant et de l’animation sur scène, abandonnant souvent sa guitare et assurant les parties de chant de son ancien comparse. Est-ce à cause de cette nouvelle configuration ? Est-ce que c’est parce qu’après près de vingt ans le groupe a moins la pêche, ou que le public a vieilli ? On ne peut pas reprocher à Pizzorno de ne pas faire son maximum pour montrer qu’ils sont encore là : il court partout, il saute, il échange avec le public… mais la magie semble partie et je n’ai pas retrouvé la même ambiance que lors des précédents concerts auxquels on avait assisté (je me souviens notamment d’un concert de clôture à Rock en Seine 2015, à la fin duquel la foule continuait de chanter les chœurs finaux de LSF (je vous mets la vidéo en illustration si vous ne voyez pas de quoi je parle) jusque dans le tunnel à la sortie du Domaine de Saint-Cloud et dans la rue). En ce qui me concerne, une partie du malaise était due au fait de voir Pizzorno s’agiter dans tous les sens pour assumer le rôle du frontman alors que ce n’était pas son attitude sur scène avant, ce qui me donnait un sentiment d’artificialité : dure question que celle de l’animation sur scène quand on assure des dizaines de concerts par an, et qu’on doit quand même faire vivre une expérience unique à son public, et que je me suis posée plusieurs fois pendant ce festival, à l’occasion des concerts réussis (The Last Dinner Party, The Hives, Blonde Redhead…), ou de performances plus questionnables (Gossip, The Offspring, PJ Harvey…), on en reparle plus bas. Une originalité que j’ai apprécié sur ce concert tout de même : les transitions entre certains titres, assurées par la diffusion de morceaux iconiques (Groove is in the Heart de Dee-Light, Breathe de Prodigy…) qui sonnaient bien avec le titre suivant qu’allait jouer le groupe. Également, j’ai re-jeté une oreille rapide aux singles des derniers albums pendant l’écriture de cet article et ils ne me séduisent décidément pas, alors que sur scène j’avais trouvé ceux qu’ils avaient joué plutôt réussis et dans le style du groupe. Pas un mauvais concert donc, mais qui m’a laissé une impression mitigée, malgré les efforts du groupe.

Frank Carter and the Rattlesnakes :

Frank Carter était déjà venu à Rock en Seine il y a quelques années mais je n’y avais pas prêté attention ; j’ai écouté cette fois leur musique et en fait… c’est très bien ! Du punk-rock assez basique mais avec des compositions réussies et des morceaux accrocheurs qui donnent envie de hocher la tête en rythme. Le chanteur est du genre énergique sur scène, il saute dans le public, il s’y mêle, il prend les téléphones des fans du premier rang pour se filmer en train de chanter… Une bonne performance, dont je n’ai pas pu complètement profiter parce qu’on s’était donné rendez-vous là avec ma moitié et avec un couple d’amis et que j’ai passé une partie du concert à échanger des messages pour organiser les retrouvailles, et obligé de rester au point de rendez-vous, qui n’était pas affreusement placé mais aurait pu être meilleur. Je les ai ajoutés en tout cas à mes artistes à suivre et je les reverrai sur scène avec plaisir.

The Hives:

Saviez-vous que les Hives ont remporté plusieurs médailles aux Jeux Olympiques de Paris cette année ? C’est ce que Pelle Almqvist nous a annoncé pendant le concert, et ce n’est (peut-être ?) pas vrai, mais ça aurait été mérité ! ^_^ Notre groupe fétiche avait pratiquement disparu entre 2013 et 2023, mais comme je vous le racontais ici ils sont revenus avec un nouvel album du meilleur tonneau, et même s’ils ont pris 10 ans, ils sont toujours aussi excellents sur scène : leurs morceaux joyeusement énergiques sont joués à la perfection, et les mecs – les deux frères Nicholaus Arson et Howlin Pelle en tête – sont toujours aussi bons pour galvaniser le public, le faire taper des mains, sauter et chanter. Ça doit faire une demi-douzaine de fois qu’on les voit sur scène et il n’y a donc plus trop de surprise pour nous, mais ça n’empêche pas le concert d’être excellent, et c’est probablement celui que je mentionnerai comme mon préféré de Rock en Seine 2024.

Gossip :

Stoeffler m’avait fait découvrir Gossip en 2006 avec l’album Standing in the Way of Control dont je vous expliquais ici pourquoi c’est un album presque parfait. Leur musique avant cet album était un peu trop abrasive, elle est devenue ensuite un peu trop pop et je suis donc bien content d’avoir pu les voir sur scène à la « belle époque ». Le groupe est de retour depuis 2023 après une interruption de 4 ans pendant laquelle Beth Ditto a tenté une carrière solo. Ils ont joué mes titres préférés et leur musique est toujours aussi dansante, la voix de la chanteuse toujours aussi exceptionnelle d’énergie, c’était donc un plaisir de les réentendre. La chanteuse était particulièrement bavarde, ce qui était un peu moins bien parce que ce qu’elle disait n’était pas toujours très intéressant : elle a donné un peu de contexte concernant certains titres (notamment le fait qu’elle avait supplié que leur plus gros succès, Heavy Cross, ne figure pas sur leur 4e album – à cause de ce qu’il raconte, si j’ai bien compris – mais que ce tube lui permettait de mener la vie qu’elle avait aujourd’hui et qu’elle faisait donc avec), et ça c’était intéressant ; mais en parallèle, elle faisait aussi des coucous à ses amis dans le public en les invitant à monter sur scène, et même s’il y avait un côté touchant à cette façon non-formatée de vivre son concert, ça tuait un peu l’ambiance entre chaque morceau. Je ne sais pas si c’était lié au fait qu’elle avait pris quelque chose avant le concert ou si c’est juste qu’elle est naturellement barrée (je penche pour cette seconde option, il me semble m’être déjà fait ce constat lorsque je l’avais vue dans une émission musicale).

Samedi 24/08/2024 :

Sleater-Kinney :

Mes attentes étaient moins élevées pour les deux autres journées du festival pour lesquelles nous avions pris des billets, mais Sleater-Kinney faisait partie des groupes qui m’avaient fait m’intéresser à cette journée du samedi. A l’époque où je les écoutais -fin des années 90- elles étaient associées au mouvement des riot grrrls ce qui ne me paraissait pas tout à fait approprié par rapport à leur musique, plus posée que ce que j’imagine du punk estampillé riot grrrl : c’était certes un groupe de filles, pionnières au sens où à l’époque, jouer du rock était essentiellement un truc de mecs, mais du point de vue musical, leur style et les dissonances dont elles aimaient parsemer leurs compositions me les faisaient surtout rapprocher de la scène rock indé. L’étiquette « riot grrrl » a été toutefois un ingrédient utile pour éveiller l’intérêt des amis venus au festival avec nous, qui sinon n’auraient peut-être pas compris ce qu’avaient de remarquable les dames qui étaient sur scène ; car, oui, les années ont passé et les guitaristes-chanteuses ont vieilli comme nous, et Corin Tucker notamment ressemble aujourd’hui davantage à une mère de famille qu’à une punkette, ce qui n’empêche pas le groupe d’avoir conservé son identité et son style propre (même s’il est moins abrasif qu’à l’époque, clairement). Au titre de ces singularités, aviez-vous noté qu’il n’y a pas de bassiste dans le groupe ? L’une des deux guitares est simplement détunée pour couvrir un spectre plus grave, et c’est tout : ça c’est original !
J’avoue que je ne les écoutais plus depuis trèèèès longtemps, mais j’avais gardé un bon souvenir d’elles et j’espérais passer un moment agréable à les réécouter, cette fois sur scène : sans que ça n’ait été l’expérience de ma vie, je n’ai pas été déçu, et même si je n’ai pas entendu beaucoup de chansons que je connaissais, j’ai bien aimé tout ce qu’elles ont joué. Je pense leur consacrer à nouveau un peu de temps d’écoute pour réécouter leurs albums.

The Kills :

Nous avons déjà eu plusieurs fois eu le plaisir d’écouter The Kills sur scène, où le duo donne corps à son rock minimaliste (une boite à rythme, une unique guitare), incarné par la flamme Alison Mosshart – corps vibrant, cheveux fous – et la glace Jamie Hince, attitude de Gainsbourg rockeur. Le son n’est pas toujours idéal (en fonction des chansons, on préférerait un peu plus de guitare, un peu plus de sa voix à elle, ou de sa voix à lui), mais les riffs sont toujours efficaces et l’ambiance est créée dès que résonnent les premières notes du premier morceau. Un concert sans surprise pour qui connaît déjà les artistes, mais qui fait quand même bien plaisir. A noter : c’est le premier concert qui m’a permis de remarquer qu’il y avait cette année parmi les cameramen du festival quelqu’un qui refusait manifestement le concept du plan cadré, et qui avait visiblement un complice en régie qui diffusait quand même ses images de cheveux, de mains ou de bouts de guitare. On était bien placés donc on n’avait pas grand chose à faire des écrans géants qui encadraient la scène, mais pour les gens qui étaient trop loin (ou trop petits) pour voir les artistes, cette vision artistique certes originale gâche un peu le truc.

Blonde Redhead :

Le thème de cette journée était décidément la réécoute de groupes vieux de vingt, voire comme ici trente ans. La personne qui m’avait fait découvrir Blonde Redhead à l’époque me l’avait vendu comme un groupe noisy dans la veine de Sonic Youth et à l’écoute j’avais été déçu puisque leur musique était beaucoup plus calme que ce que j’en attendais ; je n’étais pourtant pas arrivé après leur tournant « dream pop« , classification acquise depuis 2004 semble-t-il mais qui qualifie à mon sens leur style antérieur de façon plus appropriée. Par ailleurs, je n’avais pas été séduit par la voix aigüe et fluette de la chanteuse Kazu Makino. Je venais donc au concert avec une oreille curieuse, mais pessimiste. J’ai retrouvé sur scène au départ ce qui m’avait laissé froid sur les albums : le trio est tranquille, la musique est calme… c’est le genre de musique qu’on peut mettre en fond sonore pour s’endormir (le guitariste portait même un pyjama, c’est bien la preuve). Pour autant, j’ai été progressivement séduit par les mélodies des morceaux, et également par l’engagement de la chanteuse, qui vivait pleinement son concert, dansant derrière son clavier, se déshabillant sans gêne : alors qu’il n’y avait aucune interaction avec le public autre que la musique (ce qu’en temps normal j’aurais considéré comme un problème), cette façon de se livrer s’est révélée comme sa manière à elle de communier -à défaut de communiquer- avec son public. Ses remerciements envers le public à la fin du concert (jusqu’à la façon maladroite de tendre aux gens du premier rang – trop loin pour les attraper – les setlists en papier utilisées par le groupe) ont été l’un des moments les plus touchants du festival pour moi : on sentait qu’elle n’avait pas seulement fait son job, mais qu’elle avait sincèrement vécu et partagé quelque chose de significatif pour elle, et ça change quelque chose pour moi aussi.

The Offspring :

Le concert d’Offspring était en quelque sorte l’inverse exact de celui de Blonde Redhead : le groupe n’a joué que des morceaux pêchus et entraînants (c’est l’avantage du festival : comme les groupes n’ont généralement pas de nouvel album à vendre mais plutôt de nouveaux publics à conquérir, ils y jouent souvent plutôt leurs meilleurs morceaux que les plus récents et on assiste dans ce cas, comme ici, à un « best of » qui fait normalement plaisir à tout le monde) ; le public était à fond, tout le monde sautait et chantait, et surtout il y avait plein d’animations (un écran géant, des jets de filaments colorés dans les airs…) pendant ce qu’on peut véritablement appeler « un show » ; et c’est vraiment là qu’était le contraste que j’ai ressenti avec le concert précédent. C’est probablement lié au fait qu’Offspring devait livrer là son 109ème concert de l’année, 1256ème de sa carrière, là où Blonde Redhead ne livre plus que quelques rares concerts, mais l’artificialité des interactions entre les artistes et le public ne m’aura jamais paru aussi flagrante – et dérangeante. Outre que le duo comique assuré par Dexter Holland et Noodles était lourdingue, j’étais surtout très agacé par la prétendue spontanéité de leurs dialogues alors qu’il était clair que leurs échanges étaient scriptés et répétés à chaque concert. Tout était tellement maîtrisé que j’en ai même nourri des soupçons sur le fait qu’ils avaient peut-être des gens dans la fosse dont le job était de mettre l’ambiance (ce que je ne condamne pas en soi parce que je sais par ma propre expérience que la présence de « meneurs » qui entraînent le reste du public à lâcher prise est décisive pour la réussite d’un concert, mais qui traduirait quand même une certaine conception du spectacle). Pour ma part j’avais découvert Offspring avec la sortie de Smash (album presque parfait auquel il faudra que je consacre un article quand j’aurai le temps d’écrire) et à l’époque j’avais appris les paroles de tout l’album par cœur : c’était musicalement et thématiquement plus « sérieux » que ce qui a suivi, et ça me fait donc toujours un petit pincement d’écouter les tubes « rigolos » qu’ils ont sorti après, et de les voir produire un pur spectacle à l’américaine – même si je comprends bien qu’on n’a pas la même vision du monde quand on est un petit groupe qui galère et quand on est des artistes mondialement adulés ; et puis ils ont terminé par Self-Esteem qui est probablement leur chanson que je préfère, donc tout est pardonné.

Massive Attack :

Retour sur la Grande Scène après une pause restauration, mais une toute autre ambiance pour le concert de Massive Attack : la nuit est tombée, la scène est plongée dans l’obscurité, déchirée seulement par des flashs blancs relativement agressifs, les écrans diffusent des vidéos angoissantes sur le futur numérique (notamment une projection assez glaçante en réalité augmentée des images live du public, reprenant l’esthétique des logiciels de reconnaissance faciale, et attribuant des « tags » à chacun), sur les guerres en Ukraine et surtout à Gaza – 3D arborant courageusement un brassard « Palestine » et Daddy G un keffieh. Le concert est sérieux, à tous les sens du terme, musicalement carré et le son puissant aide à se plonger dans la musique. Marion a trouvé que les vidéos captaient au contraire trop l’attention et la sortaient de l’atmosphère musicale, mais elle n’est pas fan d’électro donc il aurait été difficile de l’y entraîner de toute façon. Pour ma part j’allais à ce concert sans aucune attente parce que je ne suis pas particulièrement fan du groupe, mais j’en suis parti content d’avoir entendu leurs quelques morceaux que j’aime, et favorablement étonné de voir qu’ils avaient avec eux plusieurs de leurs chanteurs originaux (Horace Andy, Elizabeth Fraser, le trio des Young Fathers,…) plutôt que de simplement faire interpréter leurs titres par des artistes plus modestes (et moins nombreux !).

Vox Low :

Je le mentionne juste en passant parce qu’on ne les aura pas vus sur scène, mais j’ai découvert Vox Low en écoutant les artistes en amont du festival, et mon oreille a tout de suite été séduite par leur cold wave ; j’aurais bien été les écouter mais ils passaient en même temps que Massive Attack auxquels nous avons donné la priorité, mais je garderai une oreille sur eux.

Dimanche 25/08/2024 :

Zaho de Sagazan :

Porter un nom comme « Zaho de Sagazan » (ce n’est pas un nom de scène) c’est soit le risque de ne jamais percer parce que personne n’arrivera à retenir ce nom, soit la promesse de sortir du lot par sa singularité ; l’identité vocale très personnelle – même si la familiarité avec la diction et le timbre de Stromae saute forcément aux oreilles – lui a permis de faire pencher le destin du bon côté. A 24 ans, Zaho de Sagazan est LA sensation du moment en France, au point que je trouve surprenant qu’elle n’ait eu droit « qu’à » la Scène de la Cascade (qui débordait de monde, malgré le son insoutenable, complètement saturé de basses, auquel avaient droit ceux qui n’étaient pas convenablement situés par rapport à la scène). Comme on est arrivés un peu en retard on a remonté la foule par le flanc jusqu’à trouver un endroit où le son devenait tolérable ; je ne comprends même pas comment les gens qui étaient sur les côtés près de la scène faisaient pour rester là ; on s’est retrouvés assez éloignés, mais on voyait quand même la scène et le son était meilleur, ce qui nous a permis de découvrir et apprécier l’artiste dont on ne connaissait que La symphonie des éclairs. Je ne suis pas sûr de beaucoup réécouter Zaho de Sagazan par la suite, mais j’ai trouvé sa performance réussie, ce qu’elle expliquait de sa musique ou d’elle-même entre les morceaux, sa façon d’incarner ses chansons. Sur le Ne te regarde pas final, elle s’est donnée à fond pour faire danser le public, dansant elle-même, courant… Le titre prend clairement une autre dimension dans cette version vivante. A chaque fois quand je vois des artistes sauter ou courir sur scène j’ai par réflexe la peur d’une chute… et pour une fois l’accident est effectivement arrivé lors de son ultime course dans l’allée entre la scène et le premier rang – heureusement sans gravité puisqu’elle s’est aussitôt relevée pour finir de saluer le public sur scène comme si rien ne s’était passé. J’ai trouvé cette séquence de « transe » un peu trop longue, mais j’ai aimé l’esprit du truc ; je vous mets sa version hypnotique de l’Olympia en illustration pour vous donner un aperçu.

Ghinzu :

A l’inverse de Zaho de Sagazan dont j’étais étonné qu’elle ne soit programmée que sur la Scène de la Cascade, j’avais été surpris de voir Ghinzu sur la Grande Scène parce qu’en-dehors du tube  Do you read me ? au début des années 2000, je n’avais plus entendu parler du groupe et je ne comprenais donc pas bien ce qui lui valait de tels honneurs. Je m’attendais à écouter du rock classique, sans avoir d’attentes particulières ; comme mes accompagnateurs connaissaient encore moins que moi on n’a pas tenté de s’approcher vraiment de la scène et on a donc suivi le concert de façon plutôt distante – mais pas distraite. J’ai plutôt bien aimé le set, et le public avait l’air d’être un peu plus au courant que nous de la qualité du groupe : je réécouterai pour retrouver plusieurs de leurs morceaux qui m’ont plu.

PJ Harvey :

Je n’ai pas ou pratiquement pas écouté les derniers albums de PJ Harvey mais j’ai eu l’occasion de réécouter toute sa discographie récemment et je m’étais rendu compte que mon détachement progressif à mesure que l’artiste s’éloignait du rock m’avait fait garder un souvenir sous-évalué de son œuvre : après To Bring You My Love, Is This Desire ? et Stories from the City, Stories from the Sea étaient aussi deux excellents albums. Sans cet épisode, je n’aurais peut-être pas été particulièrement intéressé par l’annonce de sa présence à Rock en Seine, mais après cette reprise de contact, c’est son nom qui m’avait fait acheter un billet pour la journée du dimanche. Nous avions fait l’impasse sur les concerts qui se jouaient sur d’autres scènes après celui de Ghinzu, et en avions profité pour bien nous positionner devant la Grande Scène, et nous étions donc dans les meilleures conditions pour profiter du moment. Malheureusement, même si nous avons été pendant ce concert plus proches de la scène que pendant tout le reste du festival, le concert a aussi été celui qui était le plus loin de mes attentes. Vêtue comme une prêtresse païenne (elle expliquera plus tard que les dessins qui ornaient sa robe blanche avaient été ajoutés au fur et à mesure de leur tournée, qui s’achevait ce soir-là), entourée de musiciens habillés façon babas cool, tous se figeant quelques secondes de façon théâtrale à la fin de chaque morceau, PJ avait manifestement en tête de créer une atmosphère particulière. C’était effectivement notable : alors que pendant le reste du festival le public manifestait bruyamment son engouement, ici il était presque silencieux, les applaudissements très brefs… A posteriori je crois comprendre que les spectateurs étaient dans l’état d’esprit, pourtant délicat à créer dans ces conditions (de jour, en extérieur, avec un public de festival donc pas uniquement composé de fans), voulu par les artistes ; pour ma part, j’étais discret parce qu’ils n’avaient au contraire pas du tout réussi à m’emmener avec eux et que je m’ennuyais sévèrement, ce qui faisait que même quand ils jouaient ponctuellement une chanson que j’aime bien, j’étais trop froid pour l’apprécier. Au bout d’une heure, j’ai proposé de partir se placer pour le concert des Pixies qui allait commencer sur la Scène de la Cascade. Marion a refusé et heureusement puisque c’est à partir de là (un quart d’heure avant la fin…) qu’a débuté le final avec enfin trois chansons que j’adore (Dress, Down by The Water, To Bring you my Love), interprétées dans une version « propre » dans l’esprit de la PJ Harvey d’aujourd’hui, et qui à la fois gardaient le charme des originaux, et gagnaient un intérêt additionnel avec ces différences subtiles. Ça restera quand même comme ma déception du festival, parce qu’une heure à s’ennuyer, c’est long.

Pixies :

Les Pixies ont produit quatre albums fantastiques entre 1987 et 1991 avant de se séparer. Lorsqu’ils se sont reformés en 2005, nous avions assisté à leur concert à Rock en Seine et j’avais été extrêmement déçu par la mollesse du set et de leur jeu. Bien qu’ils aient pris vingt ans depuis (et moi aussi, et je ne me souvenais pas que c’était si vieux que ça !), ce concert 2024 était bien meilleur, et plus énergique que le précédent. La setlist ne correspondait pas à ce que j’aurais établi moi-même (ils ont notamment joué à peu près toutes leurs B-sides, qui ne sont quand même pas franchement leurs meilleurs morceaux), ils ont joué plusieurs de mes favoris cette fois (Isla de Encanta, Bonemachine, The Happening…). D’abord assez éloignés de la scène, nous avons pu nous frayer progressivement un chemin dans la foule jusqu’à atteindre un point de vue plus sympa et qui nous immergeait davantage dans le son. Plutôt pas mal, et en tout cas moins déprimant que l’expérience de 2005.

C’est sur ce dernier concert que s’est achevée notre édition 2024 de Rock en Seine. Nous ne sommes pas allés écouter LCD Soundsystem qui clôturait officiellement le festival et dont tout le monde s’accorde à dire qu’ils sont géniaux, ce dont ce que j’ai écouté d’eux n’a pas réussi à me convaincre – même si ce qu’on a entendu pendant qu’on faisait la queue pour acheter des gaufres était assez chouette (je sais, je provoque ;p).

Mon bilan sur l’édition 2024 du festival :

– la déception : PJ Harvey
– le meilleur concert : The Hives
– quelques découvertes que je suivrai, par ordre de préférence : Dead Poet Society, Franck Carter & The Rattlesnakes, The Last Dinner Party, Vox Low

Une réflexion sur “ Rock en Seine 2024 ”

  1. Stoeffler
    Stoeffler sur

    Appréciation pour ce billet et avis qui concourt avec le tien pour le jeudi avec le léger bémol du son ou comme tu l’as évoqué l’ambiance un peu bizarre très placide loin de la scène et l’air énergique proche (enfin sur les écrans).
    Je pense avoir bien choisi mon jour même si je regrette avoir loupé The Kills ou les Pixies que je n’ai jamais vu sur scène !

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