Rock en Seine 2018 (3e journée)
L’an dernier, nous n’étions pas allés à Rock en Seine. Pas d’artistes qui nous donnent envie d’y aller, et un peu de lassitude après y être allés tous les ans depuis au moins 10 ans, sans doute.
Cette année, nous avions prévu d’y aller quand même une journée par principe. J’avais regardé la programmation, et seule la journée du dimanche proposait plus d’un artiste dont je connaissais et appréciais la musique (en partie parce que je suis moins plongé dans l’actualité musicale depuis quelques années, en partie parce que la programmation ne chasse visiblement plus les grosses têtes d’affiches)…
Bref, le choix a été assez facile à faire : si nous ne devions y aller qu’une journée, ce serait le dimanche 26 août.
Même en étant ouvert aux découvertes, je n’avais quand même noté de groupes à voir que de 17h à 21h : rien ne me bottait avant ou après. Ça nous permettait de toute façon d’y aller en mode détendus, en prenant notre temps le matin et en ne nous couchant pas trop tard en rentrant, donc ça allait très bien.
Nous sommes arrivés comme ça pile à temps sur la Scène de la Cascade pour le début du concert de Mashrou’Leila, un groupe libanais qui joue un rock mâtiné d’ambiances orientales et d’effets électroniques. Le mélange est assez étonnant et sort des conventions du rock occidental, avec des compositions qui m’ont paru moins structurées autour de l’enchaînement couplets/refrains, et des mélodies de chant également moins répétitives. L’électronique, qui s’entendait beaucoup plus ce jour-là sur scène que dans tout ce que j’ai pu trouver d’eux sur le Net, donnait un côté rythmé et dansant à leur musique. J’ai bien aimé la performance du chanteur, à l’aise dans les graves mais aussi en voix de tête sur une fin de morceau remarquable, et qui dansait réellement pendant les parties instrumentales, ce qui est rare. Les premiers rangs du public étaient visiblement des fans, qui ont (comme toujours quand ça se passe bien) pas mal contribué à permettre à l’ambiance de prendre, malgré le fait que le chant soit en arabe, que le style soit relativement déroutant, et que les gars n’aient pas vraiment un look rock. Une bonne surprise !
Les années précédentes, la logique de programmation faisait s’enchevêtrer les horaires des concerts. Ça avait l’avantage de permettre d’écouter un début de concert d’un groupe, puis de partir avant le début d’un autre concert qu’on voulait aussi voir : en général le premier était un groupe qu’on allait voir comme ça, et le deuxième un groupe qu’on voulait vraiment voir (parce qu’on se barre rarement en plein milieu d’un concert d’un groupe qu’on veut vraiment voir). L’inconvénient (surtout pour les artistes, mais aussi à un niveau moindre pour le public) c’était qu’en voyant un quart des gens se barrer en plein show, ça ruinait un peu l’ambiance du truc.
Il semble que cette année les programmateurs aient opté pour une organisation différente : la plupart des concerts commençaient à la même heure sur trois scènes à la fois, et donc il fallait choisir qui on irait voir. Un moyen efficace je pense pour éviter l’effet « migration en milieu de concert », mais qui occasionne forcément des frustrations quand on veut voir deux groupes qui jouent en même temps. C’est ce qui s’est passé sur deux des quatre créneaux que j’avais retenus.
Le premier choix à faire a été entre Wolf Alice sur la Grande Scène, et Belako sur la nouvelle scène Firestone. A la première écoute, je classais les deux groupes dans la même (large) catégorie musicale, type « rock indé », avec une énergie qui me plaisait un peu plus chez Belako. Comme le son est généralement moyen sur la Grande Scène, c’est sans trop de regret que j’ai choisi de nous orienter plutôt sur la petite scène Firestone, que nous visitions pour la première fois. Il devait y avoir une trentaine de personnes devant la scène, et il y a eu 5 minutes de retard sur l’heure de début de concert ; Marion a cru que la fille qui montait sur scène (et qui ne ressemblait pas à grand-chose avec son bermuda en jean et son T-shirt trop grand) allait nous annoncer une annulation du concert alors que… c’était la chanteuse ^_^ C’est la problématique du cadre de réception : comme la scène était petite, le public peu nombreux, que le groupe ne paye pas de mine et qu’ils ne sont pas connus, que l’animation de la chanteuse était moitié-timide, moitié-maladroite, il a fallu un peu de temps avant que l’ambiance prenne. Le concert nous a pourtant beaucoup plu : le son est bon (un peu noisy), le timbre relativement grave de la chanteuse sort de l’ordinaire, leur rock fait bouger… J’ai acheté leur dernier album pour mieux les découvrir.
Il fallait à nouveau faire un choix pour le concert suivant : j’aurais bien été voir le punk abrasif d’Idles sur la Scène de la Cascade, mais je savais qu’Ezra Furman, sur la Scène du Bosquet, avait plus de chances de plaire à Marion. J’avais eu l’occasion de découvrir l’artiste quelques mois plus tôt grâce à un article de Télérama, et j’avais bien aimé quelques-uns des titres que j’avais entendus. Sur scène, habillé en femme américaine des années 50, le chanteur ranime l’esprit glam-rock d’un Lou Reed, qu’il mélange au son du rock 50’s (il y a un saxo et un violoncelle sur scène), dans un univers un peu barré où ça cause crûment de sexe et d’autodestruction. Les compositions et le son sont assez originaux : ça ne plaira pas à tout le monde, et pas tout le temps, mais certaines ambiances et certaines mélodies fonctionnent très bien.
En sortant, on a quand même pu entendre la fin… bruyante du concert d’Idles, et ça donnait plutôt envie d’en voir plus… ce sera pour une prochaine fois.
Je vous mets quand même un petit morceau en écoute, ça vous plaira peut-être aussi (mais même si les gars ont l’air aussi bien barrés, on est vraiment très loin de l’univers d’Ezra Furman !).
Nous avons à peine eu le temps de commencer le repérage des stands de bouffe (l’un des plaisirs, systématiquement déçus mais toujours renouvelés, de Marion quand on va à Rock en Seine), que commençait le dernier concert que j’avais mis à notre programme, et celui qui me tentait le plus a priori : Jessica93, sur la Scène de l’Industrie. J’avais là aussi découvert l’artiste quelques mois plus tôt grâce aux Inrocks (c’était LA perle du mois que j’avais réussi à dénicher au milieu de toutes les daubes qu’encensent les Inrocks), et j’avais tout de suite accroché à son son revival cold-wave, grâce à l’excellent morceau que je vous mets en illustration.
Surprise lorsque nous sommes arrivés devant la scène : il n’y avait qu’un gars tout seul.
Le concert n’a pas été tout à fait ce que j’attendais, mais c’était encore mieux : le chanteur lançait sa boucle de batterie préprogrammée, commençait à jouer dessus une boucle de basse ou de guitare qu’il enregistrait en direct, puis changeait d’instrument pour jouer les parties « mélodiques » sur le canevas formé par les autres boucles. Une sorte de peinture sonore, bruitiste, hypnotique. Plus vraiment de notion de couplets/refrains, mais plutôt des nappes sonores rythmées par les percussions obsédantes de la machine, et déchirées par les plaintes tragiques de la guitare et le chant désabusé.
Si pour vous aussi, Pornography est le meilleur album de The Cure, il FAUT que vous écoutiez Jessica93 !
Voilà, ça aura été un court festival cette année (et du coup aussi, un court article ! (tant mieux, diront les mauvaises langues)), mais tout ce qu’on a vu était vraiment bien donc ça restera peut-être comme l’un de mes meilleurs Rock en Seine.
Assez réceptif pour Mashrou’Leila (effectivement c’est quand même assez différent de ce qu’on a l’habitude d’entendre mais la chanson que tu as mise est assez cool) et pour Belako, les deux titres que tu as mis sont assez sympas.
Par contre, pas trop fan de Ezra Furman et d’Idles (j’ai du mal avec le chant à la limite du juste). J’ai entendu un autre titre d’Idles qui me plaisait plus je crois, donc je jetterai peut être une oreille!
Clairement le concert de Jessica93 avait l’air bien top – ça a du être une bonne expérience.