Jane Eyre (Cary Fukunaga, 2011)
Ben, oui, j’ai été voir Jane Eyre. N’allez pas croire que c’était mon choix pour autant, c’était la vengeance choisie par Vorti pour lui avoir soi-disant *infligé* Kill List, qu’elle a détesté (de façon un peu trop véhémente à mon goût : je soupçonne qu’elle en ait rajouté pour obtenir que je lui « doive » un film ensuite).
Bref, j’ai vu Jane Eyre, dans cette nouvelle adaptation (il en existe plus d’une dizaine au cinéma, sans compter les téléfilms et les versions TV en plusieurs épisodes) de l’américain Cary Fukunaga. L’occasion pour moi de découvrir ce grand classique de la littérature anglaise, que je croyais écrit par Jane Austeen (à cause du prénom commun, voyez ? Mon cerveau crée parfois des connexions un peu débiles) alors qu’il est dû à une autre anglaise au patronyme célèbre, Charlotte Brontë (dont la sœur Emily a également écrit un classique, Les Hauts de Hurlevent). L’occasion aussi au passage de vérifier que « Jane Eyre » ne se prononce pas « Jeannère » (ça, je m’en doutais), mais finalement très simplement « Djene Ere » quand même (j’avais imaginé que ça aurait pu se prononcer « Djene Ailleur » voire « Djene Aillerie », mais pas du tout).
Aux faits ? Ok, fin des digressions, j’en viens aux faits.
Le film s’ouvre sur la course éperdue au travers des landes anglaises d’une jeune femme éplorée. On comprend rapidement qu’elle fuit, mais on ne sait pas encore quoi ; le film va alors se construire en mêlant deux trames, d’une part une suite de flashbacks nous ramenant à la prime enfance de notre mystérieuse héroïne jusqu’à cette scène d’ouverture, et d’autre part les événements qui suivent cette scène et dans laquelle celle-ci est recueillie par trois jeunes gens de la classe moyenne, dont le frère, jeune pasteur, est le chef de famille. On découvre ainsi à travers cette construction narrative moderne, l’histoire d’une jeune orpheline de la haute bourgeoisie recueillie par sa tante qui ne l’aime guère et qui trouve le premier prétexte pour l’envoyer dans un pensionnat où son caractère insoumis sera sévèrement et brutalement puni. Jusqu’à faire d’elle une jeune femme digne et bien élevée, capable à son tour d’enseigner au pensionnat, puis en tant que préceptrice lorsqu’elle a l’âge et les moyens de reprendre sa liberté. Elle va alors faire la rencontre du Lord Rochester, maître du château de Thornefield et père de la fillette dont elle doit assurer l’éducation. D’un caractère ombrageux, l’homme apparaît au premier abord comme un fieffé connard, mais celui-ci s’intéresse -et il est le premier- à la personnalité atypique de notre héroïne, et tous deux vont progressivement se découvrir, et tomber passionnément -mais platoniquement- amoureux l’un de l’autre.
L’amour entre un riche seigneur et sa gouvernante ne pouvant naturellement pas être heureux dans l’Angleterre victorienne, les événements -et un secret terrible que cache Rochester dans les pierres mêmes de son château- conduiront à la fuite désespérée de la jeune femme, découverte dans la scène d’ouverture. Celle-ci changera alors habilement son identité (de Jane Eyre en Jane Elliott : incognito total) pour commencer ce qu’elle espère être une nouvelle vie dans son nouveau foyer. Mais peut-on vraiment échapper pour toujours à la puissance de ses sentiments ? Une âme aussi assoiffée d’amour que celle de Jane pourra-t-elle se contenter d’une vie sereine mais aride auprès du jeune pasteur et de ses sœurs ?
Le réalisateur Cary Fukunaga jette avec cette adaptation un pont entre les éléments traditionnels du film romantique à l’anglaise (avec costumes d’époque, respect du poids des conventions, construction ordinaire du cadre et de la lumière des images) et modernité (avec ce schéma narratif non-linéaire, et ce choix d’acteurs plus séduisants que ne sont supposés l’être leurs personnages, pour insuffler davantage qu’une dimension spirituelle à leur amour). Les puristes reprocheront peut-être ces choix qui éloignent cette version de l’œuvre originale, mais on ne peut pas vraiment dire que Fukunaga a réellement bouleversé l’histoire avec ces touches destinées à remettre le roman au goût du jour : on est loin d’une relecture du genre de celles qui fleurissent actuellement sur les écrans, autour de classiques comme Blanche-Neige ou de divers super-héros. Pour ne pas aller trop loin, le réalisateur a même fait en sorte que ses acteurs plutôt jolis (Michael Fassbender, dont la présence justifiera sans doute la moitié des entrées féminines du film, et Mia Wasikowska, déjà vue dans le Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton) ne soient pas ouvertement sexys, et conservent une apparence fade de rigueur (bon, dans le bouquin, ils sont censés être moches tous les deux, mais la nature humaine incline probablement davantage le spectateur à partager la passion des personnages s’ils sont séduisants et bien assortis, il est vrai).
Visuellement, les amateurs de film d’époque ne seront pas désorientés et auront plaisir à retrouver les beaux décors et costumes, et d’une façon générale l’atmosphère de l’Angleterre victorienne. Du point de vue de l’émotion, le film a échoué à me faire comprendre les formidables qualités que les deux héros se trouvaient l’un à l’autre. Il aurait sans doute fallu consacrer davantage de temps à l’évolution de la relation entre ces deux âmes blessées pour mieux faire ressentir la façon dont cet amour les aide à se guérir l’un-l’autre ; mais le film réussit à éviter d’être trop long (au sacrifice peut-être d’une partie du derniers tiers du film et de la relation de Jane avec le jeune pasteur, tellement rapidement expédiée que je me demande s’il n’aurait pas mieux valu carrément la faire disparaître, à ce compte-là), et le final sobre mais puissant a quand même réussi à me toucher (et même à faire verser une larme à Vorti-Cœur-de-Pierre, c’est dire !).
En somme, découvrir ce classique au travers de cette adaptation gentiment moderne ne m’a pas déplu, même si après réflexion j’ai le sentiment que le format « film de deux heures » est un peu court pour raconter tout ce qu’il y a à raconter, notamment en ce qui concerne l’évolution des sentiments des personnages ; sans qu’il s’agisse pour autant d’une bleuette, Jane Eyre reste quand même une histoire d’amour, donc je ne recommanderai le film qu’aux amateurs du genre et/ou aux spectateurs friands d’ambiances victoriennes.
10 gressions, pas disssssgressions…
Euh… ben c’est bien ce que j’ai écrit (et je n’ai même pas été modifier mon article pour faire croire que c’était le cas alors que ce n’était pas le cas : c’était bien DEJA le cas).
Elle est peut-être plus violente qu’on ne croyait, ta chute finalement…
Tsss…