Tomboy (Céline Sciamma, 2011)
Tomboy, malgré son titre en anglais, est un film français. Le choix de ce titre énigmatique (pour qui ne parle pas couramment la langue) tient probablement à l’espoir de la réalisatrice de créer un effet de surprise dans la toute première partie du film ; on y suit en effet un jeune enfant d’une dizaine d’années, qui suite à un déménagement, arrive dans une petite ville de province au milieu des grandes vacances d’été. Par l’entremise d’une fillette de son âge, Lisa, qui lui plaît autant que lui semble lui plaire, l’enfant va être introduit et rapidement accepté par le groupe des jeunes garçons de la cité avec qui il jouera à des jeux d’enfants (foot, « action ou vérité », natation, bagarre,…), pour le reste de l’été.
Le film est très sensuel et plaisant, et ce descriptif pourrait suffire à donner envie à des gens d’aller le voir, pour le plaisir de retrouver ces sensations universelles mais lointaines des étés de l’enfance, quand on passait son temps à profiter du beau temps et à s’amuser. De ce point de vue-là, Tomboy est d’ailleurs très réussi : même s’il ne s’y passe pas grand chose, on échappe assez largement au problème des films seulement contemplatifs, desquels on tire généralement avant tout un plaisir de l’esprit (de l’âme ?). Ici, les corps sont très présents, des corps d’enfants, maladroits et pleins de vie, et le spectateur est invité à y être particulièrement attentif au travers des yeux du personnage principal, qui étudie avec minutie les gestes et les attitudes des autres enfants du groupe pour mieux s’y conformer. Le film a aussi l’intelligence de rester assez sobre en termes de dialogues, ce qui est une bonne idée quand on fait jouer des enfants : pour le coup, on n’a que rarement l’occasion de trouver qu’ils jouent faux (à part l’actrice de 6 ans qui incarne la petite soeur, mais qui compense en étant souvent très mignonne -oui, oui, je viens d’écrire qu’un enfant pouvait être mignon, ça va).
Mais à moins de tomber sur le film par hasard, ou de le voir sur les conseils de quelqu’un qui aura l’amabilité de ne pas trop en dire sur le sujet du film, difficile d’ignorer ce dont il parle plus particulièrement (attention, le reste de l’article est SPOILER si vous ne savez pas ce dont Tomboy parle) ; car cet enfant qui va se faire appeler « Mickaël » par ses nouveaux copains, s’appelle en réalité Laure, et c’est bien une fille, qui se fait passer pour un garçon. Ses stratagèmes pour dissimuler son véritable sexe, et le risque permanent qu’elle soit démasquée, avec des conséquences qui paraissent de plus en plus importantes au fur et à mesure qu’elle est acceptée par le groupe, créent une tension qui donne aussi au film une certaine intensité dramatique, d’autant plus forte qu’il est rapidement évident que la tromperie ne pourra pas durer éternellement. Quand tout va-t-il s’effondrer ? Que se passera-t-il alors ?
Tomboy réussit donc à la fois à parler d’un sujet sérieux (la détermination du sexe et les troubles qui peuvent naître d’un manque d’adéquation entre la personnalité et le corps d’un individu, les a priori qui nous font juger des comportements comme masculins ou féminins,…), tout en ayant de grandes qualités esthétiques (le plaisir de l’été, des jeux,…) et avec une intrigue qui tient le spectateur en haleine. Pas forcément un film pour n’importe quel public, mais je pense qu’il serait capable de toucher davantage que les seuls amateurs de films de ce genre (personnellement, il m’a donné envie de voir le précédent film de la réalisatrice, Naissance des pieuvres, que je regarderai cette fois sans chercher à savoir ce dont il parle ;) ).
Oué ben si tu parles anglais, ca te le pourrit vachement le film!
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