Anna Calvi au Trianon (Paris, 22 avril 2011)

Je vous ai déjà parlé d’Anna Calvi. Vous avez déjà lu ce que je pense de ce qu’elle joue -qui va de l’excellent au presque barbant, mais qui est intéressant, en tous cas- , de ce que je pense de la façon dont un buzz excessif s’est emparé d’elle, de ce que ça a engendré en termes de hausse de prix sur ses disques et ses concerts, et du coup de ma réticence de principe à claquer 28€ pour aller la voir sur scène.

Pourtant, ma meilleure moitié a réussi à me convaincre de consentir cette dépense scandaleuse (on n’était pas encore dans notre trip « recherche d’appart => budget ceinture) pour aller l’écouter à Paris ce 22 avril 2011, au théâtre du Trianon.

Alors, qu’est-ce que ça valait ?

Ben, franchement, je reste essentiellement sur mes positions : Anna Calvi est clairement une artiste prometteuse, sincère et très talentueuse ; la voir jouer et chanter « en vrai » m’aura permis de constater un peu plus clairement encore à quel point elle maîtrise sa voix, et de réaliser que pas mal de passages de ce qu’elle joue à la guitare sont quand même assez techniques et qu’elle les tient néanmoins avec brio : les moments les plus émouvants du concert auront été pour moi ces instants où elle m’aura épaté par ce qu’elle est capable de faire. L’ouverture du concert (après une première partie sympa mais surtout une attente ensuite de trois quart d’heure bien reulou) s’est ainsi faite sur l’excellent solo de Rider to the Sea (cf vidéo ci-dessous), dont j’ai réalisé qu’il n’était pas seulement une belle mise en atmosphère, mais qu’il était aussi assez fort techniquement.

Voir jouer No More Words m’a aussi fait le reclasser de « bon titre » à « très bon titre » (oui, je suis le genre de mec à faire des catégories comme ça) parce que la magnifique et touchante subtilité des changements de densité du chant et de la musique m’est apparue plus clairement ; Suzanne and I m’a aussi davantage emporté : même si en fait elle joue ses morceaux aussi parfaitement sur scène que sur le disque, voir l’harmonie musicale et rythmique entre elle et ses musiciens (qui sont pas mal du tout non plus, entre le batteur qui assure de superbes choeurs, et la multi-instrumentiste à côté qui jongle entre plus d’une dizaine d’instrus pendant le concert) m’a vraiment touché.

A part ça, je m’attendais à être davantage convaincu par les morceaux que je trouvais un peu plats sur album, et finalement non, ce n’est pas une question de froideur de l’enregistrement : la moitié des morceaux ne m’emballe simplement pas.

L’un des autres écueils prévisibles du concert était sa durée, parce qu’Anna Calvi n’a pour l’instant qu’un album à son actif, qu’il ne comporte que 10 titres et qu’il dure pile quarante minutes… ça fait court pour un concert. La belle nous a donc proposé trois inédits : sa reprise désormais habituelle du Surrender d’Elvis Presley, qui me laisse froid ; le très hispanisant Jezebel repris d’Edith Piaf, que j’ai bien aimé mais que Marion a détesté ; enfin, en deuxième rappel (si si), un morceau en cours d’écriture de son prochain album, elle seule à la guitare, et qui ne m’a malheureusement pas du tout donné hâte d’entendre ce deuxième opus, puisqu’il était plutôt dans la veine molle de la seconde moitié du premier album.

Etre le public était aussi un peu inconfortable à mon goût, parce que les morceaux d’Anna Calvi ne se prêtent pas trop à la démonstration d’enthousiasme (difficile de bouger sur le rythme ; chanter ou taper des mains pendant les morceaux est exclu sauf à vouloir en briser toute l’atmosphère…), mais qu’on a évidemment envie de faire sentir à l’artiste qu’on trouve sa prestation réussie. Les gens marquaient donc leur appréciation par des salves d’applaudissements à la fin de chaque titre, salves que j’ai trouvées généralement trop nourries (on avait l’impression que chaque titre était le dernier du concert!). Ca a même créé un moment que j’ai trouvé gênant, pendant lequel la pauvre Anna (qui malgré sa tenue de scène qui lui donne un air très strict et la puissance de son interprétation, est visiblement quelqu’un d’assez timide) a essayé de prendre la parole une fois, puis deux, en vain parce que sa voix était couverte par des applaudissements qui ne voulaient pas cesser -ce qui partait d’un bon sentiment mais n’était finalement pas très respectueux envers elle.

Au final, le concert me laisse donc la même impression que le disque, à savoir que j’ai globalement passé une bonne soirée avec des moments d’émotion intense, mais avec aussi pas mal de passages où je m’ennuyais un peu.

Pour l’anecdote, ce concert était filmé (pas que par des smartphones, je veux dire ! ), et les vidéos que j’ai posté en illustration sont tirées de cet enregistrement : si vous êtes fan ou si vous voulez vous faire votre propre opinion (sachant que la qualité sonore ne rend pas justice à celle du concert, qui était idéale), vous pouvez retrouver la totalité de la prestation en suivant les liens et en navigant à partir de là.

4 réflexions sur “ Anna Calvi au Trianon (Paris, 22 avril 2011) ”

  1. stoeffler sur

    Applaudir pendant les concerts, ca n’est pas tres respectueux des grands-parents…

  2. Akodostef sur

    J’ai failli la faire, mais je n’étais pas sûr que tout le monde comprendrait 8’D

    Sur le fond, applaudir, c’est évidemment très bien au contraire ; mais si tu ne vois pas que l’artiste voudrait parler et que c’est le moment d’arrêter pour lui laisser la parole, alors c’est un manque d’attention envers elle, c’est ça que je veux dire.

    Ceci dit, Marion m’a rappelé qu’au concert de Lisa Gerrard auquel nous étions allés avec Jib et Michmuch, la chanteuse avait demandé qu’on n’applaudisse pas, du tout. Je ne me souviens plus de la façon dont ça c’était passé, mais c’est vrai que ça faisait bizarre.
    Pour l’anecdote et pour ceux qui n’ont jamais eu l’occasion d’en vivre un, ça se passe aussi comme ça pendant les concerts de musique classique, on n’applaudit qu’à la toute fin, pas avant.

  3. stoeffler sur

    Oué, disons qu’il y a quand meme une grosse difference entre applaudir comme un demeure dans un concert ou l’ambiance ne s’y prete pas et le faire avec parcimonie, ce que tu expliquais tres justement.
    Dans ce cas precis, je pense que cela va dans le sens de ton paragraphe sur le buzz qu’elle creee, peut etre que les gens se sentent oblige d’aimer, voire d’adorer donc de lui faire une ovation a chaque fois qu’elle chante ou qu’elle se gratte la tete.

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