Interstellar (Christopher Nolan, 2014)
Je ne suis pas sûr de la raison pour laquelle nous avons voulu voir Interstellar.
L’ampleur de la notoriété de son réalisateur, Christopher Nolan, qui lui permet sans campagne marketing délirante, de mobiliser néanmoins l’ensemble des médias pour en faire LE film du moment ? Les critiques unanimement positives de cet aimé mais maudit Cercle de Canal+ qui nous aura emmené voir bien des films qui ne nous aurons pas plu ?
Pourtant, autant j’avais adoré Memento, son second film (Stoeffler nous parlait de son tout premier long métrage ici), autant les films suivants de Nolan m’ont laissé soit indifférent (Insomnia, remake sans grand intérêt à partir d’un pitch pourtant intéressant dont je n’ai pas voulu dire de mal à l’époque parce que je restais sur l’a priori positif de Memento et que j’espérais beaucoup de Nolan ; Le Prestige, petit film vraiment anodin), soit m’ont vraiment agacé (la trilogie des Batman, complètement surestimés et bardés d’invraisemblances, voir mes critiques de The Dark Knight et The Dark Knight Rises si vous ne voyez pas ce que je veux dire ; son premier Batman était tellement sans intérêt et mal filmé que j’ai oublié d’écrire ce que j’en avais pensé : résultat je ne me souviens que de l’entraînement de Batman chez les ninjas du Tibet (énorme, j’aurais adoré quand j’avais 8 ans), et de scènes de baston filmée à hauteur des poings en mouvement, totalement illisibles).
J’ai néanmoins gardé un souvenir plutôt positif quoique très flou d’Inception, que je reverrais bien pour me refaire un avis plus forgé ; c’est peut-être pour ça que je me suis dit qu’Interstellar, malgré ses 2h49 minutes, pourrait être une confirmation du retour de Nolan vers le cinéma qui m’avait fait l’aimer au départ, alambiqué et intrigant.
Pour ce qui est du côté « intrigant », les avis sont partagés : quittant une Terre en fin de vie, en proie aux pires désastres écologiques, on suit le périple des explorateurs de l’espace (Matthew McConaughey, Anne Hathaway notamment) à la recherche d’une nouvelle planète susceptible d’accueillir l’humanité. Leur parcours est semé d’embûches et de rebondissements qui maintiennent un rythme assez enlevé à l’histoire. Marion, comme sans doute une majorité des spectateurs, a été accrochée à son siège pendant toute la partie centrale du film ; de mon point de vue, Show ▼
le suspense est considérablement gâché par les premières minutes du film, même si la confusion dans laquelle on les reçoit à ce moment-là fait qu’on peut ne pas comprendre ce qu’elles signifient : comme dans beaucoup d’œuvres de science-fiction, on commence par nous plonger dans un univers alternatif, et on nous bombarde d’informations qui vont permettre progressivement au spectateur de recomposer le puzzle et de comprendre comment cet univers fonctionne, quelles sont ses divergences par rapport au monde dans lequel nous vivons et comment on en est arrivés là.
Il n’est donc pas impossible d’être tenu en haleine par la partie centrale du film, et j’avoue que moi-même, bien que n’ayant pas de doute sur la façon dont tout allait finir, j’ai suivi ces aventures avec intérêt Show ▼
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Là où le film est particulièrement réussi pour moi, c’est sur le plan de l’émotion. Le déchirement du départ, la douleur de la séparation qui transpire des messages vidéos que reçoit Cooper de ses enfants restés sur Terre Show ▼
… Ce sont des moments touchants, impeccablement joués et mis en scène.
Ensuite… il y a le dernier tiers du film. C’est probablement la partie la plus ambitieuse, où Nolan sort du simple film de genre (science-fiction/ exploration/ suspense) pour tenter d’aborder la possibilité de dimensions au-delà des 3 dimensions physiques et du temps. En l’occurrence, j’ai parfaitement conscience de l’incroyable complexité de la physique en général, de la physique quantique en particulier, et je me reconnais humblement incapable d’appréhender les potentialités de ces sciences qui dépassent largement ce que le commun des mortels est capable de comprendre : je ne me place donc pas mon commentaire sur le plan de la vraisemblance ou de la crédibilité de ce qui est proposé dans cette phase du film. Simplement, en tant que spectateur, j’ai trouvé que Nolan demandait là un peu trop d’abandon du sens critique, et l’incrédulité dans laquelle il m’a placé m’a coupé de toute émotion, puis de tout intérêt pour l’action. Je trouve un peu cruel de descendre un auteur sur la partie la plus ambitieuse de son œuvre (autant demander aux auteurs de ne plus prendre de risques et de n’utiliser que des recette éprouvées), mais malheureusement, cet essai-là ne fonctionne pas. Du coup le dernier tiers du film m’a paru bien long Show ▼
Je ne suis pas non plus convaincu par la forme que Nolan choisit de donner à sa « dimension au-delà des perceptions humaines ». C’est là aussi un pari compliqué : donner une forme à une idée métaphysique… et celle choisie par Nolan ne fonctionne pas très bien non plus.
Quant à tenter de donner une explication technique aux phénomènes inexpliqués qui se sont produits plus tôt dans le film, je ne pense pas non plus que ce soit une très bonne idée, notamment quand cette explication prend la forme d’une loooooongue redite des événements auxquels on a déjà assisté Show ▼
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Cette troisième partie est donc la plus faible du film, qui aurait gagné -aussi bien en termes de fond que de forme- à en être allégé. Résultat, alors qu’après deux heures de film je pensais sortir de la salle en jugeant Interstellar plutôt pas mal, en définitive malgré quelques bons moments et de bonnes idées, ses faiblesses et ce final manqué prennent le pas sur ses qualités, et me laissent avec des sentiments mitigés, et globalement insatisfait.
de la merde en boîte ce film! mais c’est probablement parce que mon coeur de pière n’a pas été touché par le très profond message d’amour qui pointe inopinément son nez dans le scénario, peut-être estimé trop peu rempli, entre les questionnements scientifiques poussés sur la physique quantique, la biologie de l’évolution, la sociologie des groupes, les intenses réflexions sur l’écologie, la pédagogie et les frappantes illustrations des passions, de l’ambition, la construction de soi… j’ai dû manquer quelque(s) chose(s) :)
Perso, je ne vois pas pourquoi on casse autant de sucre sur le dos d’Interstellar.
Est-ce que parce qu’avec autant de battage autour, les gens se sont crus obliges de passer le film au microscope et d’en extirper le plus « d’incoherences » possible?
J’y suis alle sans rien attendre, ou plutot m’attendre a une bouse sans nom, et j’en suis ressorti diverti. C’etait beau, il y avait de tres bonnes idees, de bons acteurs et une interpretation impeccable, des robots sarcastiques qui font de bonnes blagues, des faux rebondissements de film d’action, des incoherences scenaristiques parce qu’il est impossible de faire un film sur l’espace/temps sans creer de paradoxe et s’emmeler les pinceaux. Et puis il ne faut pas l’oublier, c’est de la SF, meme si base sur des theories connues – c’est clair qu’a la fin du film le realisateur nous plonge dans son delire d’interpretation non-scientifique et que son interpretation est personnelle. Et la d’accord, on est plus ou moins receptif au message.
Y’avait quand meme des scenes d’action remarquables et la musique, meme si le volume laissait a desirer, etait differente de ce qu’on entend d’habitude… tout n’est pas a jeter mes amis!
J’apprends que j’ai été scotchée à mon siège pendant la partie centrale du film… Est- ce qu’une moi du futur est venue à travers une anomalie gravitationnelle vivre à ma place bien plus intensément ce moment crucial de mon existence ?
@Stoeffler : j’avoue que je suis aussi très surpris (et au bout d’un moment, agacé) que la quasi-totalité des critiques négatives que je vois et entends sur ce film se basent sur ses incohérences scénaristiques, alors qu’à mon sens les défauts du film sont suffisants d’un point de vue du cinéma pour que les critiques cinéphiles fassent des commentaires d’un autre niveau, mais bon… Pour l’explication, je penche plutôt sur le fait que Nolan est réputé pour être un cinéaste au cerveau brillant, et que du coup les gens l’attendent au tournant sur la qualité de son intrigue ou de ses enchevêtrements scénaristiques.
Sur les paradoxes spatio-temporels ceci dit, je te trouve un peu trop conciliant, il me semble que les faiblesses de la dernière partie ne tiennent pas à des difficultés de gestion de concepts complexes, mais plutôt à des choix très simples du réalisateur Show ▼
. Mais bon, c’est un détail.
@Vorti : mauvaise foi ! Quand on est sortis du cinéma, j’ai dit que j’avais regardé le film avec un relatif intérêt mais sans excitation et tu as dit que pour ta part tu avais été tenue en haleine et que tu avais trouvé que le suspense était bien géré ! Tu devrais écrire sur ce blog ton ressenti après avoir vu un film, on dirait que tu oublies, sinon… :p
@ akodostef : on réécrit l’histoire… Nolan devrait prendre exemple. En sortant du film, j’ai évoqué son rythme, qui tient (artificiellement) en haleine le spectateur alors que, par ailleurs, les nombreux lieux communs scénaristiques (les personnages qui ne veulent surtout pas regagner la navette alors qu’une vague géante fonce sur eux, le docteur Mann qui tient absolument à emmener Cooper seul pour une longue promenade, etc.) font que l’ont sait généralement à l’avance ce qui va se passer. Par ailleurs, je regrette tout particulièrement le deus ex machina de la fin (même si, ici, Dieu n’est autre que l’homme qui se sauve lui-même), procédé qui invalide tout le reste de l’intrigue. J’aurai adoré voir un beau film d’exploration spatiale lointaine, parce que le thème me fascine, et j’ai été déçue. C’est, je crois, ce que j’ai dit en sortant du film mais, apparemment, je l’ai dit dans le vide interstellaire…