Rock en Seine 2011 (1er jour)

Quand j’étais au lycée puis à la fac, je faisais pas mal de prospection pour découvrir des groupes méconnus mais qui auraient mérité un plus grand succès… aujourd’hui paradoxalement, je ne m’y consacre pratiquement plus, alors que le Net permet de faire ce genre de recherche beaucoup plus facilement. C’est pourquoi j’aime aller chaque année à Rock-en-Seine, qui est l’occasion de faire le plein de découvertes aussi bien pendant la préparation de mon programme (j’écoute tous les groupes sur les trois semaines qui précèdent le festival) qu’une fois sur place, certains groupes confirmant sur scène l’impression qu’ils m’ont fait sur enregistrement, d’autres dépassant mes attentes, et d’autres encore me faisant préférer leurs versions studio (ce que je ne considère pas comme une faiblesse : c’est juste une façon différente de faire de la musique, et certains effets ou certaines ambiances passent simplement beaucoup mieux sur le support « propre » d’un enregistrement).

La première journée de Rock en Seine cette année commençait plutôt mal, puisqu’il avait plu encore le matin, et que la météo s’annonçait au mieux nuageuse… musicalement par contre, tout a bien commencé avec un premier concert d’Edward Sharpe and the Magnetic Zeros, un groupe assez foutraque qu’Elise et Pierre nous avaient fait découvrir dans la voiture pendant notre road-trip aux USA cet été. Composé d’une large famille d’une dizaine de musiciens joyeux tournant autour d’un chanteur charismatique et anticonformiste, le groupe joue une musique disons indie folk /pop avec parfois des ambiances western… Je ne suis pas sûr que tous les mecs présents sur scène soient vraiment utiles (la nana à l’accordéon, par exemple, ou le percussionniste qui joue en plus du batteur…), mais le bordel sur la scène fait partie du truc. J’ai surtout aimé leurs chansons joyeuses et leur capacité à entraîner leur public, pas facile à faire en concert d’ouverture, en plein après-midi, alors que les gens arrivent juste du métro, des queues des files d’attente, et qu’ils viennent de se faire jeter leurs bouteilles d’eau à l’entrée par les gars de la sécurité. Je vous mets une petite vidéo de ce groupe qui a tout pour devenir culte ; désolé pour ceux qui connaissent déjà et qui considèrent ce morceau comme la malédiction d’Edward Sharpe, celui qui les a fait découvrir et qu’ils sont désormais condamnés à jouer partout, mais je me sens moi-même obligé de choisir le morceau qui a le plus de chances de donner envie à nos lecteurs d’en écouter davantage ensuite : Home.

Nous n’avons avancé que de quelques mètres pour rejoindre la scène suivante et le groupe français Beat Mark. J’ai entendu dans leur musique le potentiel de groupes que j’aime beaucoup, la distorsion sonore dense (et le chant grave) de The Jesus and Mary Chain, dans la lignée du revival shoegazer dont The Pains of Being Pure at Heart semble être le porte-drapeau actuel. Mais les espaces extérieurs ne sont pas le meilleur cadre pour jouer une musique noisy, et leur son ne rendait pas grand chose. Surtout leur prestation était trop froide, mais il faut dire que le public l’était aussi, affreusement… et c’est une relation circulaire, qui se nourrit dans les deux sens. En fait, après avoir réécouté ce matin leur album, je trouve que leurs versions enregistrées ne sont pas à la hauteur de leur ambition non plus (bon, au moins, on entend moins que la fille ne chante pas bien), mais je trouve qu’il y a quand même quelque chose d’injuste à la façon dont tout ça fonctionne : je crois que si le groupe était n’importe quoi sauf Français, et qu’il était un tout petit peu connu, il aurait eu droit à un super accueil. Mais dans les conditions de ce vendredi en tous cas, ça ne pouvait pas marcher -et ça n’a pas marché.

La meilleure surprise de la journée a été Biffy Clyro. Je connaissais déjà un peu la musique du trio Ecossais, mais j’avais du mal à déterminer ce que j’en pensais… une partie de ce qu’ils jouent -notamment certains refrains- sonne comme l’émo-punk que je déteste, la production de leurs albums est parfois un peu trop léchée. Mais une autre partie de ce qu’ils jouent ne ressemble à rien d’autre et s’avère très original, et particulièrement osé en matière de construction des morceaux. C’est ce qui m’avait donné envie de les voir sur scène, et là franchement, au vu de leur interprétation fiévreuse, il n’y a plus le moindre doute à avoir quant à leur sincérité, leur originalité, leur maitrise technique,… c’était prenant, plein de patate, et décidément comme rien d’autre, aussi bien au niveau du son que de l’animation de la scène. Je suis conquis à mort, je retourne les voir sur scène à la première occasion, et en attendant je vais récupérer leurs albums et me repencher sur les deux que j’ai déjà.

C’est Michmuch qui nous a conduit sur la scène suivante, pour voir Odd Future, collectif de rap censé révolutionner le genre. Bon, je vais esquiver le commentaire pour cette fois parce que je ne connais rien du groupe, je ne m’y connais pas assez en rap, je ne parle pas suffisamment bien anglais pour comprendre les gars qui chantent et que du coup je ne sais pas si l’impression de fouillis et la saturation des basses est volontaire ou juste un mauvais tour de la sono. A priori, pas mon truc, en tous cas, et je n’ai pas vu non plus la révolution par rapport à ce que je connais du rap.

Il nous a fallu un peu de temps pour retrouver Vorti sur la Scène de la Cascade pendant que jouait Herman Düne. Le temps de dire bonjour, de prendre des nouvelles, tout ça, on n’a écouté les ballades folk (on parle souvent d’anti-folk quand on situe Herman Düne, personnellement, c’est non !) plaisantes du groupe que d’une oreille distraite. Je vous laisse écouter leur tube actuel, le premier morceau d’eux que j’aie entendu bien que le nom du groupe me soit connu depuis trèèèèès longtemps sans que j’aie pour autant pris la peine de les écouter (et la malédiction continue, mais je n’ai jamais pu me contraindre à écouter sérieusement un album de folk en entier, je sature trop rapidement) : c’est un très chouette morceau même s’il ne suffit pas à me faire enfin m’enthousiasmer pour ce genre musical.

Dilemme ! Il a fallu ensuite choisir entre CSS et Funeral Party, qui jouaient à la même heure sur eux scènes différentes. J’ai réussi à négocier d’aller plutôt voir ces derniers, dont tout le monde dit tant de bien en ce moment. Je n’avais pas été bluffé par l’album, et j’attendais de voir le groupe sur scène (où il est censé être incandescent) pour être convaincu… mais non, pas plus que sur disque, le chanteur a beau crier tout ce qu’il peut (il peut un peu moins que sur CD), leur punk dansant ne m’emballe pas assez pour même me faire taper du pied. Du coup, on a switché après 4 morceaux pour aller voir CSS à la place sur la Grande Scène, et même si j’avoue avoir un peu honte de le reconnaître (une honte que je ne m’explique pas, parce que j’aime beaucoup Le Tigre et les groupes de cette mouvance), leur rock électro est bien plus efficace pour faire bouger les pieds, la tête et les fesses. Et si je reste dubitatif quant aux qualités de la chanteuse, leurs basses groovy et leurs rythmiques sautillantes, comme la qualité générale de leur prestation ce jour-là m’ont fait regretter qu’on n’y ait pas assisté en entier.

Il était prévu ensuite d’aller écouter Kid Cudi, rappeur dont on ne connaissait rien, mais dont la vidéo de Pursuit of Happiness proposée sur le site de Rock en Seine était prometteuse. On s’est rendus compte en faisant la queue pour acheter nos grecs que le show avait du retard, au point qu’on a cru qu’il allait être simplement annulé ; il a finalement commencé quand on s’est, nous, décidés à aller rejoindre la Grande Scène pour écouter The Kills, tant pis.

Je le sais bien pourtant, que c’est toujours une mauvaise idée de manger en écoutant un concert : il m’a fallu un peu de temps (celui de se débarrasser de nos sandwiches, en gros) avant de rentrer vraiment dans le show. Il faut dire aussi que la batterie est assurée par une boîte à rythme préenregistrée, il n’y a donc qu’une guitare pour tout instrument sur la scène ; le reste de la musique consistant essentiellement en boucles répétitives, et les paroles ne comportant guère plus de quelques lignes, la musique minimaliste du duo peut passer pour du foutage de gueule (à noter quand même pour le concert de ce soir, la montée sur scène de deux choristes pour habiller efficacement deux titres en milieu de set). Leurs sonorités saturées, sombres et inquiétantes, le rythme hypnotique et le chant grave et imprégné d’Alison Mosshart réussissent pourtant à créer la magie et l’atmosphère d’un show pas très souriant mais pas mal réussi dans son genre. Leurs nouveaux titres m’ayant bien plu, ce concert m’aura au moins convaincu d’acheter leur dernier album, Blood Pressures (que j’avais manqué), et de retourner les voir dans des conditions plus propices (je pense que leur musique se prête mieux à des salles obscures et enfumées qu’à de grandes scènes de plein air). Je joins une bonne prise live d’un de leurs meilleurs titres, URA Fever, pour me consoler de la version jouée à Rock en Seine, inaudible.

J’avais prévu d’aller découvrir Jamaica ensuite, mais Élise préférait voir  General Elektriks. Ce que j’en avais entendu a priori était trop acid/free-jazz-trip-hop mollasson pour moi, mais Élise avait fait remarquer qu’ils étaient super sur scène, et on est donc partis là-dessus. Je ne pense toujours pas que j’écouterai leurs albums, mais après le concert de ce soir, je pourrais effectivement sans problème les revoir sur scène parce qu’ils sont effectivement très bons. Leurs musiques gagnent énormément en patate, leur son est dix plus puissant et efficace, et leur jeu de scène est entraînant : c’était vraiment très bien, la meilleure surprise de la journée (hop, je vous mets plutôt une vidéo d’un live, que vous puissiez juger par vous-mêmes).

J’avais eu à la naissance des Foo Fighters, saluée unanimement par le public comme par la presse cette fameuse réaction un peu conne dont je vous parle de temps en temps, et j’avais boudé de pure mauvaise foi les quatre ou cinq bons morceaux de leur premier album. Ce que j’avais entendu des albums suivants m’avait par contre vraiment paru inintéressant et c’est donc en toute bonne foi que j’ai ignoré la suite. Et puis un jour, on a tenté de reprendre leur récent Pretender avec mon groupe, et j’ai bien dû reconnaître que la chanson était super. Et en regardant un peu plus tard un documentaire qui était consacré à leur carrière et qui les rendait plutôt sympathiques, je me suis demandé si je n’étais pas passé à côté d’un groupe qui valait mieux que ce que j’en avais peut-être jugé hâtivement : c’est pour ça que j’étais content de pouvoir les voir ce soir à Rock en Seine (comme quoi je suis quand même un mec ouvert !). J’ai pourtant rapidement déchanté, parce qu’en réentendant leurs tubes (hormis ceux de leur premier album, qu’ils n’ont pas joués) formatés et sans saveur, ça m’a rappelé pourquoi je ne les aimais pas. Quant à la prestation scénique, Dave Grohl ne chantait pas, il beuglait ; le show était parsemé de petites animations à l’américaine, plus appropriées pour un spectacle familial que pour un concert rock. Je n’ai vraiment pas aimé. Et quand je me suis retourné vers les autres pour leur demander s’ils étaient ok pour partir, tout le monde a dit oui tout de suite, ce qui est assez parlant. Allez, je suis sympa, je vous mets la vidéo de ce fameux bon titre qu’ils ont sorti pour vous faire éventuellement découvrir un truc chouette, mais ne vous laissez pas duper pour autant, le reste est complètement surfait !

3 réflexions sur “ Rock en Seine 2011 (1er jour) ”

  1. Stoeffler
    Stoeffler sur

    Un petit commentaire sur Biffy Clyro, parce que j’ai deux albums et que je les ai deja vu deux fois sur scene.
    Je peux comprendre que tu n’aies pas vraiment accroche avec juste les albums, surtout si tu ecoutes d’une oreille distraite car il est facile de ne pas saisir la complexite, le changement de rythme ou meme l’originalite de leur chanson. C’est en les voyant sur scene que j’ai vraiment compris. C’est vraiment un groupe sympa a ecouter, et la chanson que tu as mise est une vraie tuerie… dommage qu’elle ne soit pas utilisee dans un spot publicitaire pour le wasabi…

  2. Akodostef sur

    ^_^
    Absolument d’accord avec ton commentaire, même si j’avais déjà remarqué à partir des disques que les structures de leurs chansons étaient tarabiscotées, quand même ! Mais tout ça prend une autre dimension sur scène, clairement.

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