Vendre des produits périmés ?

Dans la catégorie « Pour ou contre », inaugurée par Steven il y a un an et demi dans un playdoyer anti 4×4, je voulais vous proposer un nouvel article-débat : faut-il encourager/ déplorer, interdire/autoriser la vente de produits périmés ?

A l’origine ce cet article, un reportage passé aujourd’hui sur TF1 (que je n’ai pas vu, je mangeais au même moment un des meilleurs burgers de Paris, j’ai juste lu une brève sur le sujet en rentrant), expliquant qu’un magasin de Normandie commercialisait à bas prix des produits dont la DLUO est dépassée.

Qu’est-ce que la DLUO ? Il s’agit de la Date Limite d’Utilisation Optimale dont Wikipedia dit qu’elle garantit à certaines denrées une date limite au-delà de laquelle leurs qualités organoleptiques et nutritionnelles ne sont plus garanties : elles risquent d’avoir moins de goût, moins de vitamines, une consistance différente, sans pour autant constituer un danger pour la santé. Les denrées concernées sont les produits d’épicerie, le café, les conserves, les produits surgelés, les biscuits secs, les boissons, etc. Leur vente au-delà de la date limite d’utilisation optimale n’est pas interdite.

On a donc le droit de vendre de tels produits, mais est-ce pourtant une bonne chose ?

En l’occurrence, le magasin propose à prix cassés des produits dont cette DLUO est dépassée,  de quelques jours à quelques semaines (dans le reportage, on voit donc une cliente s’intéresser à un paquet de pain de mie périmé depuis 15 jours). Le succès rencontré auprès d’une clientèle à la recherche de prix attractifs a valu à cette enseigne le reportage en question, que vous pouvez visionner ici. Sans que cela aie un rapport direct avec ce qui moi me chiffonne un peu, et que je vais détailler plus bas, l’enseigne en question a publié un correctif sur sa page Facebook : « Une petite précision est a apporté au reportage de TF1. Nous ne vendons pas uniquement des produits en DLUO. Nous allons à Rungis toutes les semaines pour de nouveaux produits en frais mais aussi en épicerie, dph, etc…« .

Personnellement, je suis relativement partagé sur la question.

Evidemment, ça permet d’éviter d’énormes gâchis.

Evidemment, en ces temps de crise, ça permet aux foyers en difficulté de remplir un caddie à moindre coût.

Evidemment, en ces temps de crise, ça permet à tous les foyers de remplir un caddie à moindre coût.

Evidemment, pour certains produits, on peut imaginer que la DLUO n’a aucune incidence : de l’eau de javel, ça reste de l’eau de javel, un shampoing, ça reste un shampoing, etc.

Mais…

La DLUO ne s’applique pas aux produits frais, dont la vente après date limite de consommation est interdite : mais ne peut-on pas imaginer que du pain de mie, périmé, dont la DLUO est dépassée depuis 15 jours, est nettement moins bon ? Est-ce que le paquet, une fois ouvert, ne va pas se dégrader encore plus vite ?

Je parlais plus haut des gâchis gigantesques que l’on constate régulièrement car les grandes enseignes bazardent les produits périmés par poubelles entières (en tentant, depuis quelques années, d’attirer le chaland par des promotions sur les produits à DLUO ou dates de péremption proche). C’est partiellement faux, car les associations bénévoles ont développé un peu partout des collectes de ces produits ainsi que leur redistribution aux plus démunis ; plus démunis qui récupèrent également dans les bennes des grandes surfaces les produits invendus. Que vont devenir ces gens ? Ils devaient déjà faire les poubelles pour manger, ce qui est déjà difficile, mais si demain ils ne trouvent même pas de quoi manger par ce biais, à quoi vont-il être réduits ? (et en même temps… se positionner contre la vente de produits à DLUO dépassée sur le principe que ça en prive les plus démunis, est-ce logique ?).

Plus loin, ça me donne la désagréable impression que l’on va encore une fois dans le sens d’une société à X vitesses. Hier, il y avait les gens qui mangeaient chez Fauchon et ceux qui mangeaient chez Carouf ; aujourd’hui, il y a ceux qui mangent toujours chez Fauchon, ceux qui mangent toujours chez Carouf/Auchan, et il y a ceux qui mangent chez Lidl/Dia (=discount). Tout ça, c’est une question de budget. Et demain, il y aura ceux qui mangent des produits périmés ? Ça reste une question de budget ? Ou de principe ?

Un lien : http://www.lepointsurlatable.fr/le-blog-de-celia/les-pieds-dans-le-plat/vente-de-produits-perimes.html

Un lien belge : http://www.rtl.be/info/belgique/societe/1022604/certaines-denrees-perimees-peuvent-encore-etre-consommees

Je ne jette la pierre à personne : ni aux enseignes qui vendent ces produits (tant que c’est clairement affiché) : le but d’un commerçant, c’est de vendre (et il ne faut pas oublier que si le commerçant vend ces produits, à ces prix, c’est qu’il gagne de l’argent en le faisant). Encore moins aux clients, qui restent libres et y trouvent leur compte.

Mais bon, je n’applaudis que d’une main parce que quelque part, je ne sais pas trop si c’est vraiment positif… Et vous ?

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