Artemisia (Musée Maillol)

Judith décapitant Holopherne (1612)

Je suis hyper en retard sur l’écriture de mes articles, et ça doit faire un mois qu’on a vu cette expo sur Artemisia Gentileschi, au Musée Maillol. Comme l’expo s’y tient jusqu’au 15 juillet 2012, il ne sera néanmoins pas trop tard pour vous y rendre si ce billet vous en donne l’envie (ou l’idée).

Artemisia Gentileschi est une artiste Italienne du XVIIe siècle qu’on identifie souvent comme l’une des premières artistes féminines à gagner la reconnaissance de ses pairs et des mécènes et collectionneurs de son temps, et assimilée par là à une figure du féminisme. Après des débuts à Rome aux côtés de son père Orazio (lui-même artiste renommé à l’époque), Artemisia obtient en effet la protection du Grand-duc (et fameux mécène) de Medicis et devient la première femme acceptée à l’Académie du Dessin de Florence, avant de croitre encore en prestige et en influence au point de devenir l’une des chefs de file du style caravagesque (qui accentue les effets de clair-obscur dans les scènes représentées pour en augmenter la puissance et la théâtralité) et finir par diriger son propre atelier à Naples pendant plus de vingt-cinq ans.

Vorti et moi connaissions surtout Artemisia (comme sans doute la majeure partie du grand public) pour sa toile la plus célèbre et la plus impressionnante, Judith décapitant Holopherne (1612). Cette œuvre est bien présente dans l’exposition, avec plusieurs autres toiles fameuses dont notamment plusieurs consacrées au même sujet, mais à différents moments de l’histoire ; la jeune Artemisia avait en effet été violée par son précepteur, et cet événement et le dur procès qui s’en était ensuivi est réputé avoir marqué durablement son style et inspiré notamment cette série de toiles où une femme forte tire sa vengeance de sang-froid sur un ennemi réduit à l’impuissance.

Saint Jérôme, d'Orazio Gentileschi (1611)

On ne retrouvera pas en revanche dans l’exposition parisienne un autre chef-d’œuvre fameux d’Artemisia, Suzanne et les vieillards (1610), dont seule une version d’atelier est proposée ici. Beaucoup d’autres toiles sont en revanches exposées, dont plusieurs qui ne sont pas d’Artemisia elle-même mais soit de ceux qui furent ses élèves, soit d’autres artistes de son temps (dont un très beau Saint-Jérôme (1611) de son père Orazio). En résulte l’impression générale d’une grande inégalité dans l’œuvre de l’artiste, qui apparaît capable du meilleur comme du plutôt passable, et seules très peu de toiles ressortent du lot au final ; personnellement, j’aurais préféré un choix plus restreint, mais mieux centré car pour le coup les toiles annexes ne m’ont pas paru apporter beaucoup à la mise en contexte de l’œuvre d’Artemisia, et elles affaiblissent au contraire pas mal la force des meilleures peintures. La disposition des toiles est aussi assez déconcertante, puisqu’elle suit un schéma vaguement anti-chronologique qui ne semble pas vraiment avoir de pertinence ; c’est très certainement la taille des oeuvres qui a nécessité qu’elles soient placées là où elles le sont (la salle principale du rez-de-chaussée étant notamment plus haute de plafond), mais cette disposition n’aide pas à suivre la trajectoire de l’artiste ni l’évolution de son style et ne sert pas non plus une présentation thématique de son œuvre, ce qui accentue encore l’impression de fourre-tout inégal que donne déjà le choix des peintures exposées. Dommage.

Pour finir néanmoins sur une note positive, c’était sauf erreur de ma part la première fois que je visitais une expo consacrée à l’art classique (plutôt qu’à la photo ou à l’art moderne) au Musée Maillol, et cette visite m’a permis de constater que paradoxalement, en se tournant vers ces arts plus anciens, la fondation s’est aussi modernisée d’une part en repensant ses conditions d’accès, et surtout d’autre part en proposant désormais une application IPhone/IPad HD (vendue 3,99 €) qui remplace avantageusement un audioguide (puisqu’en plus du support plus pratique, cette application propose des reproductions HD de très bonne qualité des œuvres présentées, et que vous pouvez ensuite conserver ce guide et ainsi revoir indéfiniment les œuvres et réécouter les commentaires qui les accompagnaient ; et même si 3,99 € c’est un peu cher pour une appli, mais c’est moins cher que la location d’un audioguide). Une très bonne initiative !

Judith et sa servante (vers 1618)

Judith et sa servante Abra avec la tête d'Holopherne (vers 1640)

5 réflexions sur “ Artemisia (Musée Maillol) ”

  1. Pour moi qui pense m’y rendre fin mai, cet article tombe en fait à point nommé, merci!

  2. Akodostef sur

    Tout le plaisir est pour moi :)
    Bienvenue sur Même Esprit, si c’était ton premier passage !

  3. nikoala sur

    Bonjour,
    Savez-vous s’il est possible d’accéder à l’exposition gratuitement dans le cadre de la nuit des musées ?

    Merci

  4. nikoala sur

    Je les ai appelés : la réponse est « non, le musée maillol ne participe pas du tout à la nuit des musées ».
    Comme ça c’est clair !

  5. Akodostef sur

    Apparemment, tous les musées ne participent pas, en effet. Et certains participent, mais n’ouvrent pas toutes leurs collections… Bref : c’est bien de se renseigner avant !

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